Discours de Michael Delafosse
Je veux, au nom de la ville de Montpellier, saluer le courage qui est le vôtre, celui de nos concitoyens d'origine iranienne, les Iraniens que nous avons l'honneur et le devoir d'accueillir en France, qu'on va nommer la diaspora, qui, il faut l'entendre, la presse, parfois est intimidée dans notre propre pays par la République islamique d'Iran, où il faut être courageux pour défendre les valeurs universelles, même en France. Je veux le dire. Et chaque fois qu'il le faudra, nous serons là.
Nous serons là. J'ai été bouleversé un samedi, quand ces banderoles, ces affiches étaient là, et une jeune femme m'a dit : « Monsieur le Maire, c'est dur parce que j'ai peur. J'ai peur pour moi, j'ai peur pour ma famille en Iran. »
Il faut prendre la mesure de ce qu'est ce régime. Et l'écho de l'Iran n'est pas seulement, je vais y venir, les photographies qui nous arrivent, les nouvelles. Je veux vous remercier pour avoir rappelé l'engagement qui était le mien en 2009 autour de la jeunesse qui se levait, qui déchirait, et c'était spectaculaire dans les rues de Téhéran, dans les grandes villes d'Iran, et qui a été là encore réprimée. Moi, j'ai découvert l'Iran, non pas en y allant.
À travers les livres d'histoire, bien sûr, nous rappeler quand même que la civilisation perse est l'une des plus anciennes du monde et que ses héritages sont multiples sur le monde. Mais parce que précisément, j'ai eu, adolescent, ici à Montpellier, à Paris, j'ai rencontré des enfants de gens qui ont dû fuir après 1979 et qui ont eu une influence sur moi et qui ont contribué à ma compréhension des enjeux du monde. Et j'espère, je regrette, je veux saluer Mme Markovitch, conseillère départementale, les élus et Amnesty, évidemment, et les gens qui sont là, présents des comités de quartier qui nous font être là.
Mais moi, je souhaite que ces rencontres aient lieu parce qu'il faut prendre la mesure de ce qui se passe. Il ne faut pas qu'on soit indifférent au monde. Et c'est pour ça que, cher Stéphane, cher Clare, chère Fatma, vous avez porté cette initiative, évidemment, avec les équipes des espaces verts, pour planter cet arbre.
Parce que quand une théocratie domine, quand un régime totalitaire domine, on se sent, nous, ici, très démunis. Mais le meilleur allié des théocraties, des régimes totalitaires, c'est l'indifférence du monde, qui ressemble à une forme de complaisance. Alors nous, ici, à Montpellier, nous avons dit, en mettant une grande banderole sur la mairie de l'hôtel de ville, avec ce visage, magnifique visage qu'on avait mis et qui ressemblait au profil de Marianne, sur la maison commune à Montpellier, où sont proclamés trois mots que vous avez, avec force et une élégance incroyable, cités : « Liberté, Égalité, Fraternité ». Nous voulions dire, ensemble, à cette jeunesse d'Iran qui veut écrire sa modernité, nous sommes avec vous.
Et aujourd'hui, en plantant cet arbre, parce que le combat n'est pas encore gagné, loin de là, nous voulons continuer à réaffirmer cet engagement. Et merci, cher Stéphane. Nous le faisons, non pas en opposant les combats, mais en rappelant que l'humanité, pour l'idée même d'humanité, a dû se battre.
Suzanne Babut, juste parmi les nations, parce qu'elle a protégé des enfants, parce qu'ils étaient juifs et allaient mourir sous un régime, le régime nazi, mais parce que des Français, dont la milice à Montpellier les dénonçait et les faisait arrêter, envoyer au camp d'Agde et ensuite à Drancy, pour finir à Auschwitz, les a sauvés. La mémoire de Suzanne Babut est associée à cette jeunesse d'Iran qui lutte. Parce que ce sont des combats universels.
La liberté est un combat universel. Et nous devons le dire comme tel. C'est le sens, d'ailleurs, de l'action internationale de la ville de Montpellier.
C'est d'essayer de porter ce que nous croyons, des valeurs universelles. Certains disent, mais non, c'est occidental. Ben non, c'est universel, la liberté d'expression, la liberté de croire ou de ne pas croire.
On voit bien que partout sur la planète, des hommes et des femmes luttent pour cela, que la place des femmes dans une société est un combat universel. Et donc aujourd'hui, en Iran, avec un courage incroyable qui force le respect, et où des fois, quand nous voyons ces photos, c'est très impressionnant par les réseaux sociaux, ces photos où on voit de dos ces vêtements, on voit ceux-là, mais c'est incroyable. On voit ce voile arraché, scandé, pris comme un étendard de liberté.
Ce courage-là de cette jeunesse qui, au péril de sa vie, nous apprend des pendaisons, des choses épouvantables. Ben nous, on doit dire qu'on est de aux cotés de cette jeunesse.
Et donc, le collectif Femme, Vie, Liberté, je veux vous le dire, il est en nous. Il est chez lui, ici. Chez lui.
Et dites-leur, envoyez ce signal, vous n'êtes pas seuls. Je le dis aussi, si ici, il y a des réfugiés, des gens qu'ont fui, la maison est ouverte. Et nous ferons tout pour assumer le devoir d'asile que doit être celui de la France, qu'il me soit permis de le rappeler.
Le devoir d'asile en France, il y a l'hospitalité, ça, c'est ce qu'on doit ouvrir, tendre la main, aider. Mais le devoir d'asile à la Révolution française, après avoir proclamé les droits de l'homme, le 26 août 1789, les constituants, ont dit la France doit l'asile à tous ceux qui sur la planète, de par le monde, combattent pour la liberté et sont persécutés parce qu'ils défendent la liberté. C'est pour ça que nous avons ce devoir d'asile.
Il conviendrait des fois de le rappeler un peu plus fort, son origine, son importance. Je voudrais enfin terminer. Vous avez dit des choses très fortes sur la géopolitique du Proche-Orient pour laquelle tous ici, nous aspirons à la paix.
Nous souhaitons que l'État d'Israël, fondé par le droit international, puisse vivre en sécurité. Nous considérons que le peuple palestinien a droit à un État en vertu du droit international. Nous sommes aux côtés des Israéliens qui aujourd'hui, dans les rues, ou plutôt demain soir, dans les rues de Tel Aviv, aspirent à un changement démocratique dans leur pays parce qu'ils sentent bien que celui qui les dirige les conduit à une impasse.
Y compris fait mal à Gaza. Et de la même manière, les gardiens de la Révolution sont une organisation terroriste qui finance le Hezbollah, qui régulièrement menace à la fois la sécurité d'Israël, mais ce peuple au Cèdre qu'est le peuple libanais.
Que l'attaque du 7 octobre par le mouvement terroriste Hamas a été déclenchée de manière délibérée parce que, justement, il y avait une quête d'un chemin de dialogue avec d'autres pays du Proche-Orient et en l'occurrence l'Arabie Saoudite. Et là, la rivalité. Et vous l'avez dit, et je veux le relever avec beaucoup de courage.
Donc, il nous faut être en soutien de cette jeunesse parce qu'elle combat quoi ? Elle combat une théocratie. Une théocratie qui considère que le dogme s'impose à tous et porte atteinte à une liberté fondamentale pour laquelle, ici, nous nous sommes tant battus dont nous savourons l'héritage qu'est la liberté de conscience. Chacun doit pouvoir croire ou ne pas croire.
Mais la religion ne doit pas nous dire ce que nous devons être. Elle relève de l'intime. Victor Hugo avait cette phrase qui disait : « L'État chez lui, la religion chez elle. »
L'État n'a pas à dire ce que les gens doivent croire. L'État doit garantir les libertés.
Et donc, vous l'avez dit, et je suis très heureux, je veux rebondir là-dessus, parce que, lors de la remise, la grande distinction qui m'a été faite, qui m'a énormément touché, où, paraît-il, je suis le seul raisonnable politique à l'avoir obtenue le prix de la laïcité, on a rendu hommage au collectif Femmes, Vies, Libertés. La laïcité n'est pas un principe juridique, comme certains le disent. Vous vous rappelez, à travers ce combat, qu'elle est une valeur universelle, que la laïcité n'est pas une spécificité française qui devrait être négociée.
Elle est un enjeu universel pour garantir la liberté de conscience. En Iran, en Afghanistan, dont nous avons, malheureusement, vu l'immense recul qui est à l'œuvre, et là aussi, notre devoir d'accueil à l'endroit des réfugiés, de ceux qui fuient, qui combattent. Nous avons accueilli un maire qui a... Enfin, bon, je m'égare, là.
C'est le même sujet, mais je ne veux pas être trop long. Et donc, c'est un combat universel. Alors, aujourd'hui, à la jeunesse d'Iran, sous le bruit de la nature, des oiseaux qui chantent, nous affirmons très fortement que Montpellier est à leurs côtés.
Nous leur disons, et je veux leur dire, qu'un jour, la victoire sera là. Les régimes totalitaires finissent toujours par tomber. Ils tombent parce qu'à la fois, il y a dans le monde des citoyens qui lèvent des pancartes, des élus qui prennent la parole, des arbres qui se plantent, des symboles qui sont mobilisés et qui disent d'ailleurs à nos diplomates : « Soyez fermes ». Ça, je prends pour mon gouvernement à moi.
L'immensité de la civilisation perse, sa créativité, son envie d'écrire la modernité finira par l'emporter. Je veux terminer là-dessus. Chaque fois qu'à Montpellier, nous avons l'honneur de recevoir une œuvre d'un cinéaste, d'un écrivain, j'en parlais avec mon ami Jean-Paul Montanari, un chorégraphe d'Iran, c'est à chaque fois un sentiment très fort.
Et on sent que cette aspiration à la liberté qui embrasse la jeunesse, qui embrasse les artistes, elle finira par l'emporter face à ce régime théocratique qui sent bien que la liberté menace ses petits privilèges et ses dogmes. Alors comptez sur nous, comptez sur nous, comptez sur moi, et puissions un jour nous retrouver pour célébrer la chute de ce régime infâme. Je vous remercie.