"La question de l'égalité femmes-hommes est un enjeu majeur de politique publique"

Photo de Michael Delafosse aux assises de la féminisation des métiers numérique

Discours de Michaël Delafosse lors des assises de la féminisation des métiers numériques.

"Madame Elisabeth Moreno, Ancienne Ministre déléguée à l'égalité Femmes-Hommes

Madame Sophie Béjean, Rectrice de l'académie de Montpellier

Monsieur Philippe Soursou, Directeur de France Travail Hérault

Monsieur Edouard Forzy – Président de la Mêlée

Il faut continuer à faire tomber les plafonds de verre et il reste encore beaucoup de chemin à faire. Et c'est pour ça que je veux vraiment remercier la mêlée d'organiser ce moment, cette journée, parce qu'au fond, il ne faut pas juste dire, “il y a qu'à”, il faut trouver des chemins, questionner, interroger, bouger les pratiques, et mettre en soi, à l'agenda, la question de la féminisation dans le numérique, c'est déjà un pas, et je veux vous saluer.

Je veux évidemment saluer Mme la rectrice, votre action, parce que nous savons qu'entre le primaire et le collège, déjà beaucoup de choses se jouent dans ce qu'on appelle les sciences, les maths, et nous étions la semaine dernière avec Cédric Villani pour l'ouverture du parvis Grothendieck, et c'était un des sujets que nous abordions avec le doyen de la faculté de sciences, et à l'école d'ingénieurs Polytech, en se disant, mais quand on franchit ce parvis, il y a déjà majoritairement des hommes. 

Donc il y a un immense enjeu dans notre société autour des représentations. Et je veux vous remercier toutes et tous, mais tout principalement d'être ici, parce qu'il faut qu'on vous voie. Parce qu'une jeune fille qui est en CM2, elle doit pouvoir se penser ingénieure, elle doit se penser informaticienne, elle doit se poser comme membre partie prenante de la French Tech, et donc d'une entreprise du numérique.

Un des chemins qui est essentiel, ce sont les projections. Je crois que la rectrice et le ministre l'évoqueront, mais ça, ça compte énormément. Je vous parle de ça, non pas de ma seule expérience de Maire, mais de professeur d'histoire et géographie.

Et on le voit, il y a beaucoup de choses, les modèles, les images, ça compte énormément. Ça, c'est le premier point. Donc montrer que c'est possible, montrer que c'est possible.

Deuxième sujet que je voudrais ici évoquer devant vous, c'est qu'on soit collectivement vigilants et vigilantes sur nos représentations. Nous avons encore, parfois, dans les discours, et peut-être je ferai quelques maladresses, si c'est le cas, il faut m'en pardonner, surtout de les corriger, des perceptions. 

C'est quelque chose qui a des idées très fortes encore dans la société. En fait, ça, il faut les corriger, il faut reprendre les gens dans les réunions publiques, dans les réunions, etc., pour ne pas laisser s'installer ou perdurer ce type de préjugés.

Je le dis avec beaucoup de force parce que ça concerne parfois les administrations publiques, parfois les discours des décideurs publics, et que ça, il faut les casser. Je vais vous prendre d'ailleurs un exemple. Mme la rectrice le connaît bien parce que je l'utilise.

Vous savez, parfois, dans les quartiers populaires, on se réjouit de l'engagement des parents. Ils ont dit « Les mamans sont formidables, elles ont fait la fête de l'école ». Ah bon ? Et les papas, ils sont où ? Il ne faut rien laisser passer. Rien laisser passer.

Et ça, ça me semble essentiel. En tout cas, moi, je vous donne un blanc-seing pour reprendre tous les services de la mairie à l’Halle de l'innovation, à la French Tech, etc… pour ne rien laisser passer.

Parce que ça pèse, c'est lourd et ça rend les choses difficiles. Le troisième point que je voudrais évoquer avec vous, c'est évidemment, sur le territoire de Montpellier, nous, on essaye de soutenir l'entrepreneuriat. Je veux le dire d'ailleurs, moi, je me souviens très bien, en 2019, je n'étais pas encore maire et président de la métropole, mais j'ai choisi comme vice-président du développement économique une femme qui avait créé une entreprise dans le numérique, Hind Emad.

Et il me semblait très important que le visage de l'économie soit une représentante d’une start-up. Et je crois que c'était très juste. Mais ce que je voudrais dire ici également, c'est de travailler, c'est d'être à vos côtés, à l'arrêter, et nous tous, pour que nous puissions favoriser toutes ces problématiques du temps.

Le temps, c'est celui qui consiste, pour les enfants, et donc d'avoir une offre de crèche. Juste à côté, vous avez la première crèche à horaire atypique, plus tôt le matin, plus tard le soir. Nous allons, avec l'appréhension de l'université, faire une crèche sur le site de l'université à proximité du campus, parce que parfois, il y a des doctorantes, et il faut pouvoir les accompagner.

Et donc avoir un soutien pour enlever tout ce qui peut freiner. C'est aussi être très attentif à ceux et celles qui font des reprises de parcours professionnels, alors qu'on se met en formation, alors qu'on a encore les enfants. Ou être encore plus attentif, et je terminerai là-dessus, sur les femmes seules avec enfants.

Parce que ça, c'est un des grands fléaux de notre société. Fléau, le mot est peut-être fort, mais c'est une des grandes fragilités sociales. Moi, je suis très frappé de voir à quelle vitesse une femme qui se sépare de son conjoint, peut être déclassée professionnellement.

Comment elle peut être en sentiment de grande vulnérabilité. Et oui, il faut assumer à la fois sa propre charge matérielle, souvent c'est sur elle que repose la responsabilité des enfants, c'est elle qui porte la charge mentale, et donc il faut affronter cet environnement extrêmement difficile, et ça c'est une fragilité dans l'évolution de carrière, dans les reconversions de carrière, dans les choix de vie professionnels. Et là-dessus, je veux le dire, nous, à Montpellier, on n'a pas de solution miracle, il faut produire une idée sur ce sujet comme sur les autres, mais on engage un travail très important, on passera d'ailleurs une délibération pour pouvoir accompagner ce type de parcours, pour pouvoir justement faire en sorte que les choses puissent changer, en tout cas s'améliorer, qu'on évite ce déclassement-là.

Alors, il va au-delà des seules filières du numérique, mais je vois tellement d'histoires. Et parfois l'organisation du temps de réunion, la durée des réunions, les modalités d'organisation des réunions, elles sont en soit genrées.

Il y a là un rapport au temps qui doit être changé. Je vous dis ça parce que parfois, nous tenons des assemblées, des réunions, des briefs, etc., dès que dire, ça vaut dans la vie des administrations, dans la vie démocratique, dans la vie des entreprises, qui sont complètement décalées à l'endroit des modes de vie. Et je pense, et c'est pour ça que je suis un peu en freestyle, parce que j'avais rarement eu l'occasion de dénoncer publiquement, je pense que là aussi on a une grande responsabilité.

Moi je pense qu'aujourd'hui ce rapport à l'organisation du travail, au temps utile, est aussi un facteur déterminant. Bref, à cet instant, je viens de livrer peut-être une contribution aux réflexions de ce colloque, sur la question de la professionnalisation, et je suis sûr que j'ai fait écho à plein de réalités vécues dans différents univers. Je veux vous dire que ces thèmes, au-delà du plaisir de vous accueillir, vous êtes chez vous, mais que ces thèmes sont ici à l’hôtel de vie, chez vous.

Moi, je revendique être un maire féministe, je porte un agenda féministe, pas enfermé, mais qui pense que la question de l'égalité femmes-hommes est un enjeu majeur de politique publique. Et si je veux terminer par une image qui m'a beaucoup marqué, à la fin du XXe siècle, il y avait un personnage qui s'appelle José Luis Zapatero, qui était Premier ministre en Espagne. Et celui-ci disait à un  journaliste du Monde, Jean-Marie Colombani à l’époque :  « Mais en France, un gouvernement de gauche arrive, il fait les 35 heures, et vous, vous faites une loi contre les violences faites aux femmes ». Et le Premier ministre espagnol avait eu cette phrase, il avait dit « On juge la démocratie à l'aune de la place qu'elle réserve aux femmes ». J'avais trouvé ça extrêmement fort de sa part… En tout cas, excellent travail à vous, et en avant pour l'égalité.

Je vous remercie."