La France est le pays qui garantit à chacun la liberté religieuse. Nous sommes là pour continuer à défendre un projet de fraternité

Aboubakar

Discours à l'occasion du rassemblement républicain à la suite de l'assassinat d'un citoyen dans une mosquée en raison de la religion.

Montpellier, le 28 avril 2024, Parvis de l'Hôtel de Ville/ 

Voilà, les nombreux élus présents. Je tiens à saluer également tous les Montpelléirains et Montpelléiraines qui ont pu se libérer pour venir ce midi devant l'Hôtel de ville et les très nombreux qui ont écrit des messages de soutien suite à l'épreuve que traverse notre pays.

Je veux remercier ici les représentants de l'ensemble des cultes qui sont présents, mais évidemment saluer les représentants du culte musulman qui sont dans l'épreuve. Merci à chacun de votre présence. Saluer chacun dans vos grades, qualités et fonctions, mesdames et messieurs.

Avant de tenir un propos qui sera bref, puis de donner la parole à monsieur le préfet, je vous demande de bien vouloir observer une minute de silence à la mémoire d'Abu Bakar. La Grande Combe n'est pas très loin de Montpellier. Certains diront cette proximité géographique justifie ce rassemblement.

Ce n'est pas un argument. Ce rassemblement d'autres villes en initient et c'est bien. Ce qui s'est produit samedi frappe l'ensemble de la communauté nationale.

C'est un coup de poignard dans les valeurs de la République qui a été donné. En effet, la mort d'un fidèle dans un lieu de culte, une mosquée, est un crime contre nous tous, contre nos valeurs. Notre pays pose comme principe fondamental la liberté de croire ou de ne pas croire.

Les lieux de pratique du culte sont des lieux qui relèvent de cette liberté fondamentale. Eglise, synagogue, mosquée, temple bouddhiste, etc. sont des lieux de garantie de cette liberté.

Nous nous sommes rassemblés à de nombreuses reprises, chère Hélène, maire honoraire. Quand un père a été tué dans son église. Quand, hélas récemment, une synagogue, monsieur le préfet, a failli voir la vie humaine chavirer.

Il n'était donc pas concevable que, parce que dans une mosquée un homme était tué, nous ne tenions pas ensemble debout ici. La République doit être ferme pour défendre ses principes. Les lieux de culte de l'islam ont toutes leurs places dans notre pays.

Et doit-on rappeler à tous ceux qui parfois tiennent des discours de haine qu'ils sont présents depuis longtemps sur le sol de France ? Être le maire de Montpellier, c'est se rappeler que les fouilles de la ligne 1 du tramway mirent à nu des temples maometanes du XIIe siècle, comme l'ensemble de la baralerie nous rappelle la présence hébraïque. Il y a beaucoup d'endroits sur le sol de France où des maires peuvent prendre la parole ainsi, pour rappeler que notre pays depuis longtemps a connu, connaît la pluralité de conscience. Et donc, ce qui s'est passé samedi nous oblige.

Oblige à la fermeté pour protéger les lieux de culte. Monsieur le préfet, je sais que vous avez pris d'ores et déjà des initiatives pour assurer les lieux du culte musulman dans notre ville et je veux vous en remercier. Vous savez pouvoir compter sur mon engagement, celle de la police municipale, celle des caméras de vidéoprotection, pour que chacun des fidèles puisse vivre sa foi en toute sécurité.

C'est une liberté fondamentale que nous devons garantir. République ferme, République unie. La République est un projet de fraternité.

Elle n'est pas un projet qui doit vaciller sous les diatribes racistes, anti-musulmans, xénophobes, intolérantes. Elle doit être unie. Rappelons que la laïcité garantit à chacun le droit de croire ou de ne pas croire.

Et chacun d'entre nous doit se sentir touché par cette mort dans un lieu de culte, parce qu'Abu Bakar vivait sa foi à sa manière, comme des millions de nos compatriotes. La République doit être ferme et unie, parce qu'il est nécessaire de le rappeler, parce que mes chers concitoyens, chères concitoyennes, nous le sentons tous. Il y a du relâchement dans nos valeurs communes, non pas des institutions de la République, mais peut-être du comportement de chacun et de chacune, où ici, là, nous laissons passer une parole blessante, outrancière, qui vise à mettre en cause la foi, qui vise à stigmatiser nos concitoyens de confession musulmane.

Pouvons-nous supporter cela ? La haine prospère sur nos silences. C'est donc notre responsabilité de nous retrouver, de réaffirmer ce en quoi nous croyons comme projet commun. La France n'est pas le pays d'une religion.

La France est le pays qui garantit à chacun la liberté religieuse. C'est notre histoire. Elle fut tragique de par le passé, et y compris dans cette ville où on daignait aux protestants le droit de croire, parce que les fanatiques catholiques étaient là.

Mais c'était aussi la grandeur de ce pays d'accorder à la Révolution française la liberté de conscience. Et c'est la grandeur de ce pays de se dresser chaque fois que quelqu'un est victime de l'intolérance religieuse. Et aujourd'hui à nos concitoyens musulmans et concitoyennes musulmanes, je veux leur dire, avec le plus haut représentant de l'État dans notre département, que nous sommes là.

Je veux le dire au nom des habitants d'une ville, Montpellier, et associer chacun de mes collègues maires. Nous sommes là pour continuer à défendre un projet de fraternité. Il n'existe pas en France de citoyens différents d'autres citoyens.

Si nous acceptons cela, c'est l'essentiel de ce que nous sommes qui recule. Alors, mesdames et messieurs, merci d'avoir répondu présent. Merci à l'ensemble des élus de la République qui ont jugé utile en cet instant d'être là.

Merci aux collègues maires qui prennent la même initiative. Car le jour où nous nous refuserons de nous lever en acceptant l'inacceptable, eh bien alors, une partie de ce qui est ce pays aura péri. Aujourd'hui, à ceux qui représentent le culte musulman, soyez assurés de notre soutien plein et entier, total, pour garantir votre liberté, pour rappeler à chacun de nos concitoyens et, pardon, à ces étudiants du monde qui viennent d'une université et que nous pouvons croiser, parfois sortant de la mosquée, parce qu'ils vivent leur foi, qu'ici, ce pays est leur pays.

Ainsi, depuis des générations, nous avons lutté pour que cette devise de liberté, d'égalité et de fraternité soit bien vivante. La mort d'Aboubakar nous oblige. Continuons à rester debout pour une République ferme sur ses principes, unie autour de ses valeurs.

Vive la République et vive la France.