L’appel du 18 juin est une référence inspirante qui doit habiter chacun d’entre nous

comémoration appel du 18 juin

Madame la représentante du Département, Mesdames et Messieurs les membres des autorités civiles et militaires, je voudrais saluer Monsieur le délégué de la France Libre, merci de sa présence fidèle à nos cérémonies.

Avant de donner quelques mots, je voudrais saluer les décorés à l'occasion de cette cérémonie, témoigner du soutien de la population, aux forces de sécurité, gendarmerie, police nationale, police municipale, pompiers et nos militaires.

Nous tenons cette cérémonie ici sur l'esplanade dénommée Charles de Gaulle. Souvent, dans l'imaginaire Montpelliérain, c'est l'esplanade. Mais cette dénomination rappelle combien le conseil municipal de Montpellier, au lendemain de la libération, a jugé utile et nécessaire d'exprimer sans doute modestement sa reconnaissance en dénommant cette allée centrale qui a vu défiler celui qui a permis d'inscrire notre pays parmi les vainqueurs.

L'année prochaine, nous nous retrouverons à côté du monument aux morts, au pied de l'appel du Général de Gaulle qui a été posé sur un rocher il y a de cela une dizaine d'années, et nous retrouverons le buste du Général de Gaulle, alors président de la République, qui a été offert par la Société de l'Ordre National du Mérite.

Aujourd'hui, nous célébrons l'appel du 18 juin comme chaque année. Nous le faisons dans l'année des commémorations de la victoire des alliés contre le nazisme. Il y a ici des jeunes que je veux saluer qui assistent à cette cérémonie.

Il faut peut-être resituer l'appel du 18 juin dans son contexte. Récemment, à Montpellier, nous avons fait le choix d'honorer celui qui porta l'analyse la plus lucide sur la France de 1940, Marc Bloch, auteur d'un ouvrage majeur, L'étrange défaite, qui raconte combien le pays, somnolait, ne comprenait pas les enjeux de son époque. La France, en l'espace d'un mois, fut submergée par ce que le Général de Gaulle qualifie dans son appel d'une force mécanique.

La France est submergée et elle connaît plus que L'étrange défaite, la débâcle. Des millions de nos concitoyens vivent l'exode, fuient partout où ils le peuvent et descendent vers le sud. Montpellier fut d'ailleurs une des villes qui accueillit une partie des populations fuyantes, y compris d'une nation amie, la Belgique.

Le 17 juin 1940, sur une autre radio que la BBC, une voix vieillissante prend la parole et déclare faire don de sa personne à la France et appelant fort, utilisant de son prestige pour aller emprunter le chemin du déshonneur et capitulant. Il s'agit de Pétain qui, un mois et quelques jours plus tard, fit tomber la République sous l'applaudissement d'une majorité de parlementaires où seul 80 trouvèrent le courage de dire non. Le 17 juin, c'est cette voix qui mène la France à l'impasse, au déshonneur et au mépris de ses combats historiques.

Une autre s'élève de l'autre côté de la Manche, où elle trouve l'hospitalité d'une nation amie pour laquelle notre reconnaissance doit être éternelle : le Royaume d'Angleterre, dirigé alors par Churchill. Il proclama quelques semaines avant à la Chambre des Communes : « Jamais le Royaume de sa Majesté ne capitulera ». Quand bien même le gouvernement se retrouverait de l'autre côté de l'Atlantique, il mènera le combat. Le Général de Gaulle, le 18 juin, au lendemain du 17, appela la France à combattre et à refuser l'idée de capitulation.

C'est un homme seul, qui trouve en lui le courage, la clairvoyance, de tracer un chemin, celui d'une France qui ne renonce pas, ni sur ses valeurs, ni sur ses principes. Son appel fut peu entendu. D'ailleurs, l'enregistrement que nous avons tenu à passer n'est pas celui du 18 juin.

Il est le dernier, ou plutôt le premier, enregistré quelques jours plus tard. Il trace un chemin où quelques-uns entendront et rejoindront la France libre. Ils seront très peu au départ.

Mais progressivement, le pays comprendra l'abîme dans lequel Pétain l'a entraîné. Ce sont ces actes de résistance qui commenceront à marquer le sol national. Et notamment la cérémonie du 11 novembre 1940 à Paris, où la jeunesse lycéenne et étudiante de la Sorbonne, de l'école des hautes études en sciences sociales, ira dans la clandestinité faire des tracts pour défier l'occupant.

Ce furent ces hommes et ces femmes qui rejoignirent le combat à Londres. René Cassin, Jean Monnet, Jean Moulin, qui furent accueillis par le Général de Gaulle avec leur mission de revenir parachuter sur le sol de France pour unifier la résistance. Ce fut dans ce que le général dit dans son appel.

La France possède un vaste empire. Et c'est l'historien Patrick Boucheron, professeur au Collège de France, qui nous rappelle que la France libre commença à Brazzaville, où celle-ci refusa l'autorité du gouvernement de Vichy. Seul, le 18 juin, une voie, un chemin, dans lequel les Françaises et les Français se sont reconnus.

L'appel du 18 juin doit être commémoré chaque année. Car bien sûr il renvoie à une histoire et une épopée héroïque pour la France, qui lui permet aujourd'hui encore de siéger dans le concert des nations et notamment comme membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Mais l'appel du 18 juin, c'est aussi un regard sur nous-mêmes, sur les valeurs humaines, de lucidité, de ne pas suivre les foules, les meutes, de tenir face à l'esprit de résignation et d'abandon, de toujours regarder les événements avec discernement, avec clairvoyance, de convoquer en nous une valeur qui nous distingue dans les espèces qui habitent cette terre, celle du courage.

Le Général de Gaulle, le 18 juin 1940, abandonnant tout de sa famille, de ses proches, était cette voix du courage. Elle doit être encore une source d'inspiration face aux événements et aux épreuves que nous sommes invités collectivement à rencontrer dans ce monde si turbulent et si bousculé.

L'appel du 18 juin n'est donc pas juste un événement historique. Il est un repère pour chacun d'entre nous, françaises et français, dans notre rapport aux événements, aux tragiques. Et il nous montre qu'aucun destin n'est écrit. Nous pouvons changer le destin.

C'est ce qu'a fait le Général de Gaulle quand, le 17 juin, la France capitulait. Il a dit, le 18 juin, la France continue le combat. Et par la bravoure des hommes et des femmes qui l'ont accompagné dans cette épopée qui est celle de la France libre, il a pu, le 26 août 1944, célébrer la libération de la capitale après avoir entendu le chant des partisans, celui de l'hymne national qui avait été remplacé par un hymne au maréchal.

Merci à vous de cette présence, à cette cérémonie. Merci à nos forces de sécurité. Merci aux associations de mémoire qui œuvrent inlassablement, qui parfois se disent : « on ne nous entend pas assez ». Mais nous vous écoutons ardemment.

Merci au service de l'ONAC et du protocole d'avoir l'exigence que ces cérémonies puissent conserver un caractère solennel et puissant. Car le jour où nous ne commémorerons plus, où nous n'aurons plus rendez-vous avec ces rituels, alors il est certain que notre pays perdra beaucoup de ses repères.

Merci à vous ; soyons fidèles à l'esprit de l'appel du 18 juin et à ce que le Général de Gaulle a porté toute sa vie, une certaine idée de la France habitée par la grandeur ; grandeur humaine qui se conjugue avec la grandeur de notre pays, la France.